Road Book au Nevada avec les Buckaroos
Nevada, juillet 2007, un incendie sans pareil depuis 1909, dévaste 300 000 hectares de pâturages. Pour permettre au bétail d’échapper aux flammes, une cinquantaine de ranchers tombent les clôtures. L’automne venu, ils font appel aux Buckaroos pour réunir, trier, convoyer quelque 7000 vaches…
Dans le nord ouest des Etats-Unis, une terre rude, ingrate, farouche, balayée par les vents, est appelée Big Empty ou grand vide. C’est là que Bo et Cathy Lowe élèvent du bétail. Avec un cheptel d’une centaine de têtes, ils ont figure modeste dans cette contrée. Réunis au sein d’une coopérative de 56 éleveurs, ils occupent, avec leurs voisins, quelque 450 kilomètres carrés d’open range (des espaces publics loués pour l’élevage extensif de bovins).
Les immenses prairies où paissent les broutards (de jeunes bœufs engraissés pour faire de la viande en un an) sont recouvertes d’une plante parasite – la sage brush ou sauge – qui prive l’herbe d’oxygène. Ici, il faut donc compter 20 hectares par nourrir Marguerite chaque année. Pour joindre les deux bouts, les Lowe multiplient les emplois. Lui est prédicateur baptiste ou cowboy à la journée. Elle contrôle les troupeaux en partance pour les abattoirs. Egalement accueillent-ils depuis peu des citadins qui souhaitent glaner une poignée de frissons en partageant, l’espace de quelques jours, la rude existence des gens de l’Ouest. Tout allait donc pour le mieux dans le meilleur des mondes jusqu’à ce que, un jour maudit de juillet dernier, la colère des dieux ne fonde sur les hommes de l’Ouest.
Tout commence par un coup de foudre.
En quelques heures, le feu ravage des milliers d’hectares de broussailles sèches. Les ranchers cherchent à évacuer le bétail vers des zones épargnées. Peine perdue. Le vent, malin, s’ingénie à tourner, à les prendre à revers, à les faire enrager, à menacer leur vie. Une seule solution s’impose alors : tailler des brèches dans les enclos. On doit pousser les vaches, inconscientes du danger dans les montagnes environnantes. Certaines périssent. Dans les jours qui suivent, les cowboys, hommes endurcis s’il en est, ne peuvent retenir leurs larmes à la vue de leurs vaches effroyablement brûlées. Ils doivent abattre sur place celles qui meuglent encore de douleur.
Des mois après on découvre un paysage d’apocalypse, brûlé, calciné, tondu de sa végétation foisonnante. Ne subsiste qu’une terre nue, noire, désolée, presque encore fumante.
Nous sommes en octobre. Alentour, sur les flancs des reliefs déjà enneigés, un œil de lynx distingue les vaches qui, réfugiées en altitude, tout à la fois pour fuir les flammes et trouver à manger, redescendent, délogées par le froid. Par grappes plus ou moins fournies, elles s’égayent sur des milliers d’hectares. Ici ou là, apparaît un cadavre bovin. Ne reste que la carcasse encore couverte de sa peau. Les vautours et les coyotes sont encore ballonnés d’un tel festin.
Désormais l’heure est à la polémique. Si la foudre est bel et bien la coupable, les ranchers affirment que l’administration n’a pas su, pu, voulu déployer, le moment opportun, les moyens nécessaires pour atténuer l’ampleur des dégâts. Victimes mal indemnisées, ils déplorent que des milliers de dollars engraissent de prétendus spécialistes qui ne quittent jamais le confort citadin pour seulement approcher leur réalité et prennent des décisions plus dictées par la théorie que par la pratique
C’est alors que les buckaroos arrivent pour réunir le bétail…
Le terme buckaroo est une américanisation d’un mot espagnol vaquero (vacher).
Au Nevada, le coq chante tôt. Dès avant sept heures, tranquillement, chacun se prépare. Le poêle ronronne. Buckaroos et guests se retrouvent dans la salle commune, toute habillée de bois, pour un roboratif breakfast. Œufs, saucisses, hahsbrown, pancakes, café… Il faut bien cet amoncellement pantagruélique pour sustenter l’homme de l’Ouest. Dehors le soleil est déjà haut. Gregg selle son cheval et s’en va chercher la quinzaine de chevaux qui s’éveillent au bord de la rivière. Habitués, ils se laissent pousser vers les corrals où chacun récupère sa monture pour la préparer et l’harnacher. On s’amuse de découvrir le foulard du jour de nos amis buckaroos. Oh le beau rouge ! On peut bien sourire. Ils ont la gorge protégée des vents malins. Egalement arborent-ils des colts à la ceinture dans des étuis ouvragés. « Pour achever une vache condamnée ou faire fuir des coyotes ». Puis ils nouent la queue de leur cheval. Chevaux et buckaroos semblent jouer une scène mille fois répétée dans un calme impressionnant. Pourquoi s’affoler ? Pas d’affolement non plus au moment de rentrer dix chevaux sellés dans les trailers.
Le Nevada n’est pas le désert plat que l’on imagine. Il possède nombre de sommets de plus de 3000 mètres.
Ready? Ok, c’est parti. Le convoi s’ébranle. Cap sur l’horizon où, majestueuses, se dressent des cimes blanches. Nous nous engageons sur une piste qui sinue dans un paysage grandiose. René raconte sa vie. Donne des précisions sur les buckaroos. Livre des conseils sur les chevaux. Il est intarissable et on ne se lasse pas de l’écouter. Puis on se retrouve au milieu de nulle part. Sage brush et arbustes rivés sur une terre ocre et pierreuse nous encerclent. Objectif de la journée assigné aux buckaroos par Bo : explorer le secteur. Il scinde les effectifs en deux équipes pour mieux ratisser large. Sur un ou deux kilomètres nous voilà partis au trot en quête des vaches perdues. C’est l’allure naturelle des buckaroos pour se déplacer sans trop fatiguer les chevaux. C’est d’ailleurs le rythme que les équidés choisissent à l’état sauvage quand ils se déplacent sur de grandes distances en terrain plat. Ce n’est pas celle des cowboys du dimanche. Je prends le galop. Ce faisant je me doutais bien que je transgressais la règle qui veut que l’on ne dépasse pas le boss, question de sécurité… et d’étiquette.
Très vite, nous quittons la piste pour gravir une crête. Ainsi aurons-nous vue sur un large panorama, précise Gregg. Les chevaux, quarter horses, mustangs, appendix, cocktails de prairie divers sont tous volontaires, sûrs, sereins. Ils montent, descendent, tournent, virent, sur les cailloux sans jamais faillir. Ils dévalent des dénivelés vertigineux en glissant doucement. Mon pote Guy dit qu’ils descendent les « sabots dans le nez ». Des chevaux de ranch quoi. Mais de vache point. On scrute en vain l’horizon. Un horizon qui se met en quatre pour nous séduire. Whooaaa ! Nous sommes dans l’Ouest Américain. Grands espaces infinis. Liberté. Un aigle plane dans le ciel azur. Parvenus près d’un ruisseau où coule un mince filet, Gregg suggère une pause casse-croûte. On entrave les chevaux avec des hobbles (des espèces de « menottes » fixées aux pieds des chevaux pour les empêcher de marcher). Les buckaroos, qui connaissent leur terrain (ici il n’y a guère d’arbres où les attacher) habituent leurs chevaux à ce système. Ainsi pas de souci. Un cheval, un petit futé pour sûr, se met à genoux pour brouter une herbe appétissante. Un doux soleil d’automne nous donne des envies de sieste paresseuse. Entre-temps l’autre équipe nous a rejoint. Bredouilles aussi. Si l’on s’étonne de ces heures – fort agréables au demeurant – passées à fouiller une botte de foin sans trouver jamais l’aiguille, les buckaroos nous précisent l’essentiel pour eux : s’assurer qu’il n’y a pas sur les parcelles explorées de vaches oubliées.
Etre buckaroo, c’est d’abord un art de vivre.
De nouveau en selle, nous sommes invités à nous déployer en largeur, un cavalier tous les cent mètres. Stratégie efficace. Moins d’une heure plus tard, Bo aperçoit un groupe de vaches au fond d’un canyon. Avec quatre cavaliers, il les rejoint. Sans gestes ou cris inutiles, il les canalise à travers une pente où s’accrochent des genévriers. La progression est lente, difficile. Il faut slalomer entre ces arbres gris, chenus, antédiluviens, aux courbes fantastiques. Enfin, il réapparaît un vague sourire sur les lèvres. Pour peu expansif qu’il soit, on devine sa satisfaction.
Si Bo a pu les repérer c’est qu’il possède la première qualité du buckaroo. Il connaît son terrain. Sait les endroits où les vaches peuvent se réfugier ou s’abreuver. En outre, l’œil sans cesse aux aguets, il peut lire le sol (les traces), les bouses, les poils arrachés par quelques branches.
Il faudra aux buckaroos et à leurs modestes renforts de nombreuses journées pour retrouver 7000 vaches disséminées sur des milliers d’hectares. Cependant, à la fin de chaque semaine, ils organisent des rassemblements. C’est le rodear ou round up. Epaulés par des ranchers voisins, ils regroupent des centaines de vaches dans une immense prairie. Une dizaine de cavaliers encerclent le troupeau qui meugle, piétine, roule des yeux. Le cow boss, rentre alors à cheval dans la masse bovine, repère la vache qui l’intéresse, et calmement, pour prévenir une débandade toujours possible, l’extrait. Deux cavaliers prennent le relais et l’accompagnent dans un autre coin où peu à peu va se constituer un nouveau groupe. Il arrive qu’une ou deux récalcitrantes leur donnent du fil à retordre. Ainsi s’opère le tri qui permet de restituer les vaches de Bill à Bill, les vaches de Bob à Bob et ainsi de suite…
A la mi-journée, l’opération est terminée. Les vaches d’un rancher sont convoyées vers un corral, les autres reprennent leur passe-temps favoris : brouter. Et tous les cavaliers sont invités dans le ranch voisin pour partager une collation bienvenue. Et pour faire plaisir aux frenchies, ils ont même débouché une bouteille de vin. Voilà qui indique clairement que l’amitié franco-américaine est intacte.
Infos pratique
Vous rêvez depuis toujours de partager la vie des cowboys. C’est possible. L’Agence du voyage à cheval organise des séjours dans les ranchs. Là, accueillis chaleureusement, vous chevaucherez dans les grands espaces, chercherez les vaches égarées, convoierez les troupeaux, participerez au round up, au tri, au branding, aux journées de vaccination. En clair vous vivrez avec et comme les cowboys un programme journalier uniquement inspiré par les nécessités de l’heure. À l’occasion, vous bivouaquerez, vous dormirez sous un ciel étoilé. Une expérience mémorable.
Ils étaient une quinzaine de français cet automne chez Bo et Kathy. Unanimement, ils se sont réjouis de cette expérience.
Mais attention, tous les working ranches ne sont pas aussi authentiques. Certains organisent des animations pour faire plaisir aux touristes.
Ceux qui préfèrent monter à cheval sans contrainte, comme bon leur semble, doivent choisir la formule dude ranch.
L’Agence du Voyage à Cheval, créée et animée par Rémy Pagnard et son équipe, propose aux Amériques (Nord et Sud) des voyages hors du commun. A la carte : formule working ranches pur jus ou formule équitation.
Tous les renseignements sur www.agenceduvoyageacheval.com
Remarque… Les Français sont souvent interloqués face à la religiosité et à la sobriété des Américains. Ceux qui considèrent qu’un verre de vin rend la vie plus agréable doivent apporter leur(s) bouteille(s).
Une fois au Nevada, ne manquez pas, chaque année en janvier, d’assister au Cowboy Poetry Gathering: d’Elko, un grand rendez-vous festif consacré à la culture des buckaroos. Du 26 janvier au 2 février 2008, la 24éme édition met à l’honneur, après les Camarguais en 2007, les Mexicains de la province de Sonora.
Le reste de l’année, à Elko, on peut visiter l’atelier et le magasin mythique du sellier JM Capriola.
Bibliographie
A lire en anglais…
How to make cowboy horse gear de Bruce Grant
Hackamore Reinsman d’Ed Connell
Bridles & Bits d’Ed Connell
The cowboy at work de Faye Ward
El vaquero d’Ernie Morris
El buckaroo d’Ernie Morris
Cowboy Culture de David Dary (Avon Book)
Vaqueros de Martin W. Sandler (chez Henry Holt)
Plusieurs de ces ouvrages et d’autres sont présentés sur le site www.capriolas.com
Cowboy, dites-vous ? Non, Buckaroo
De même que le bison était tout pour les Indiens (nourriture, vêtements, habitat, outils, médicaments etc…), les bovins fournissent des éléments essentiels à notre bien-être.
Depuis que l’homme vit grâce à l’exploitation du bétail, il a mobilisé son meilleur auxiliaire : le cheval. Sur toute la planète se sont donc développées des traditions équestres inspirées par les exigences de l’élevage. Dans le monde entier, on connaît le cowboy américain immortalisé par Hollywood. Ce que l’on sait moins, c’est qu’il existe deux types de cowboy… Pour simplifier – si on en a le droit ! -, on va dire qu’il y a les Texans et les Californiens.
Les premiers, très connus, pragmatiques, sont plus tentés par l’efficacité de la modernité que par les charmes de la tradition (fut-elle également probante). Les seconds, peu connus en France, sont les buckaroos. Héritiers des vaqueros mexicains (et de la culture équestre espagnole), ils ont développé en Californie dès le 19eme siècle des spécificités en termes d’équipement (selles, harnachement distincts), de vêtements, de techniques, d’esprit.
Un seul numéro ne peut intégrer tous les trésors de cette culture équestre majeure. Nous vous proposons donc un rendez-vous régulier pour en découvrir chacun des aspects.
Au fil des siècles, le vaquero mexicain d’origine espagnole est devenu, en Californie, un buckaroo. Cette mutation linguistique de l’espagnol à l’américain désigne aussi un cowboy sensiblement distinct du stéréotype habituel.
En1769, le Père franciscain Junipero Serra établit la première mission espagnole à San Diego en Californie (alors possession espagnole). Pour s’occuper de leur bétail, les missionnaires font appel à d’anciens esclaves d’origine maure échoués là après avoir ramé ferme comme galériens sur les galions des très catholiques souverains ibériques. Ces affranchis, nonobstant leur déchéance, étaient pourvus de la nationalité espagnole. Ils étaient donc autorisés à monter à cheval. Plus tard on enrôla également des Indiens Chumash. Les uns et les autres devinrent des garçons vachers, plus précisément des vaqueros. Influencés par leurs origines espagnoles et mauresques, ils ont développé une véritable culture vaquera. Impécunieux, ils prirent l’habitude de confectionner eux-mêmes tout ce qui était nécessaire à leur labeur quotidien au contact du bétail. Ainsi sont-ils devenus de véritables artistes dans les arts du cuir et de l’argent.
Aujourd’hui encore, ces cavaliers très exigeants peuvent engloutir des fortunes dans une selle ouvragée.
Ils aiment arborer en toutes circonstances des vêtements, certes adaptés aux impératifs climatiques et fonctionnels, mais aussi susceptibles de les distinguer. Parallèlement, ils mettent un point d’honneur à obtenir de leurs chevaux un dressage très fin. Dans cette optique, ils ont développé un art équestre original. Enfin, ils quêtent l’excellence en toute chose. Aussitôt que possible ils prennent le temps de faire un beau geste (au lasso par exemple) plutôt qu’un geste simplement efficace. C’est aussi le meilleur moyen d’épargner de la tension au bétail car stress = perte de poids = perte d’argent.
Ce sont ces éléments – l’équipement des chevaux, l’habillement des cavaliers, l’art équestre, l’esprit vaquero – qui distinguent sensiblement les buckaroos californiens des cowboys texans.
Avant de devenir buckaroos, les vaqueros ont connu leur âge d’or, au XIXe siècle. A cette époque, la couronne espagnole concède, à ses sujets les plus riches, d’immenses domaines aux Amériques. En 1830, les grands propriétaires s’attachent leurs services pour développer les bénéfices de leurs haciendas fondés sur le commerce du cuir et de la graisse. Seul quelques Zorro troublent leurs quiétudes. L’intégration de la Californie aux Etats-Unis en 1848, bientôt suivie de la Gold Rush (Ruée vers l’or), met un terme à leur tranquillité et à celle de leurs employés. Cependant les traditions de ceux-ci restent bien vivantes. Ils reprennent vite du service au sortir de la Civil War (Guerre de Sécession) vers 1865 quand débute le Cattle Business (le marché du bétail) qui va donner naissance, le temps de quelque trois décennies, au mythe du cowboy.
Les cowboys texans sont rapides et efficaces, les buckaroos californiens sont fins et stylés.
S’il n’est bien sûr pas question d’opposer les uns aux autres, on doit souligner qu’il existe deux types de bouviers en Amérique du Nord, les cowboys (d’inspiration anglo-saxonne) et les buckaroos (sous influence espagnole). Ceux-ci sont encore très présents dans les états voisins de la Californie où s’étend le Great Basin : Oregon, Nevada, Idaho. Mieux, on observe un très net regain d’intérêt pour cette culture chez les jeunes Américains. Fidèles à leurs traditions, déterminés à les pérenniser, ils refusent les tâches qui ne se font pas à cheval. La qualité de leurs prestations leur assure des employeurs fidèles. Les buckaroos ont un passé, un présent, un futur.
Les raisons de la colère…
Pourquoi êtes vous en colère?
René Duyckaerts : La vie des ranchers fut et reste indexée sur les conditions météorologiques. Nos revenus dépendent directement du ciel. Quand un incendie de cette ampleur se produit, la nourriture pour le bétail manque et donc augmente. Tous ensemble au même moment, nous cherchons à vendre nos vaches. Cette inflation de l’offre entraîne immédiatement une chute des cours.
La faute à qui ?
RD : Comme de coutume l’administration a tergiversé, perdu du temps. D’un point de vue économique comme d’un point de vue écologique ce sont les ranchers qui payent la facture. Par ailleurs, on abreuve de milliers de dollars des fonctionnaires qui ignorent tout du terrain. Trop contents de se gaver, ils pondent des expertises bidons et des préconisations fumeuses. Ils ont décidé, plutôt que de laisser la nature appliquer ses propres solutions, de labourer et d’ensemencer. Bullshit ! Mais derrière les erreurs de l’état, comme toujours, se profilent les libéraux et les écolos.
Les écolos c’est comme les pastèques, vert à l’extérieur, rouge à l’intérieur. Ils veulent la fin des bœufs sur le domaine public. Prétendument pour diminuer la couche d’ozone. Dans cette optique, ils voudraient que nous devenions tous de tristes végétariens.
Les libéraux (NDLR : entendez les démocrates qualifiés ici de socialistes), prennent des mesures qui tendent à supprimer le mode de vie des gens de l’Ouest. Voilà ce qui est inadmissible.
MATERIEL BUCKAROO
Principes de base
Le buckaroo n’a qu’un but : avoir un cheval de bride, optimum, très précis… Réceptif aux rênes légères qui délivrent d’une seule main des signaux invisibles.
Dans cette optique, il débourre à l’ancienne avec un hackamore. L’hackamore est un ensemble composé d’un bosal (souvent en rawhide ou cuir brut), d’un mecate (rênes en crin de cheval, de plus en plus remplacé de nos jours par du coton voire du nylon), d’un fiador (sous-gorge). Il en existe de différentes tailles pour accompagner l’évolution du jeune cheval.
Le buckaroo a coutume de commencer le travail du jeune cheval dès deux ou trois ans. Il propose toujours à son élève six semaines de travail assidu à raison de 30 à 60 minutes par jour, parfois plus, parfois moins, selon les progrès. Et ce, cinq jours par semaine. La règle est simple : on importune le moins possible les bons élèves. Pour apprendre les bases du travail de ranch à un jeune cheval, il décline une série de bosals, du plus gros au plus fin (plus le cheval évolue, plus le bosal est fin). Mais rien n’est figé. Le feeling garde le dernier mot. Il peut arriver qu’un cheval conserve un même bosal six mois durant. Le programme débute par énormément de travail au sol.
Le Texan à l’inverse entame l’éducation de ses jeunes chevaux avec des snaffle bits (mors de filet). Il n’a recours qu’ensuite à un hackamore.
Le hackamore – instrument délicat – reste un outil d’éducation. Il donne beaucoup au cavalier pourvu de doigté. A l’inverse… Il ne saurait être question de le laisser au cheval tout au long de sa vie.
Au terme de leur formation, les chevaux destinés aux professionnels embouchent alors directement un spade bit. Les autres doivent prendre des embouchures intermédiaires davantage tolérantes pour les approximations de la main du cavalier amateur. A noter que l’AQHA, (American Quarter Horse Association) qui organise nombre d’épreuves amateurs, prohibe ce mors.
Le Buckaroo utilise des rênes fermées prolongées par un romal (fouet) non pour le cheval mais pour le bétail. A l’inverse le Texan, qui travaille beaucoup dans les broussailles, préfère les rênes séparées. Cet exemple démontre si besoin était que les équipements des uns et des autres répondent précisément à des impératifs de climat, de terrain, de spécificités des tâches à accomplir.
R E N É D U Y K A E R T S
Buckaroo
René Duykaerts est né en Europe il y a 59 ans, il a vécu une existence hors du commun avec pour fil conducteur, la passion du cheval et la volonté précoce de devenir buckaroo. Histoire d’un rêve devenu réalité.
« Vous venez de perdre un Belge et un gendarme ». Voilà ce qu’a envoyé le jeune Luxembourgeois René à un sergent recruteur qui refusait de prendre l’engagement de l’affecter dans un régiment de cavalerie. A défaut de faire carrière sous l’uniforme, René rentre en Afrique où il a grandit et apprit l’art équestre sous la tendre férule de Jacques Licart (fils d’un commandant de Saumur). Son père lui propose de suivre des études d’architecture à Kinshasa (ex Congo Belge). Une fois diplômé, il restaure des châteaux pour le baron Wenceslas de Tserclaes qui défrayera la chronique pour trafic d’œuvres d’art. A cette époque, et certains pionniers de la western attitude en France s’en souviennent, il suit les clinics de Tom Mayer. Il se rend ensuite en Arabie Saoudite pour construire des édifices gouvernementaux. On lui propose d’autres missions, en Russie ou en Libye. «I don’t want to work for communists o terrorists ». Il refuse. De toute manière, cette existence, pour lucrative qu’elle soit, est trop différente de ses rêves : vivre avec les chevaux.
En 1982, il rend son tablier et prend le premier vol pour les Etats-Unis. Depuis plusieurs années, il multipliait les séjours chez les cowboys. Aussi, quand il débarque avec sa fortune contenue dans un sac à dos, il se rend directement avec son pote Charly chez Lee Roeser, alors gestionnaire d’une pack station qui loue des guides et des mules à qui veut se rendre dans la Sierra Nevada californienne. Très vite, il devient un muletier spécialiste du bât. Puis il débourre, entraîne, convoie. Engrange progressivement les compétences du parfait cowboy.
Lors de ses premiers séjours aux Etats-Unis, comme tout le monde, il ne connaît des cowboys que la version texane, classique. En 1972, l’opportunité lui fut donnée d’élargir son horizon. Un certain Arizona Smith lui révèle l’existence des buckaroos. Révélation. Il sera buckaroo ou rien. Arizona, qui travaillait au Texas avec la panoplie du buckaroo, était taquiné. « Tu es de l’ancien temps », lui disait-on. Mais il était si performant que l’on ne pouvait rien lui reprocher. « Un jour, il m’a donné un magnifique secret. Il tient en une phrase – Git along with that horse until that horse gits along with you ». On peut la traduire par : Va avec ce cheval jusqu’à ce que ce cheval vienne à toi ».
Dès lors René n’a eu de cesse de percer les secrets de l’harmonie avec les chevaux. Il a beaucoup lu. A commencer par la bible des buckaroos : Le traité d’utilisation de l’hackamore d’Ed Connell. On y reviendra.
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